Créé le 06-02-2013 à 20h18 -
Par Doan Bui
Cyclothymie, maniaco-dépression, bipolarité : quels sont les symptômes et les traitements de cette maladie encore assez méconnue, qui touche 6% de la population ?
- Maniaco-dépressifs et bipolaires, c'est pareil ?
Il y a trente ans, la psychiatrie ne parlait pas de troubles bipolaires mais de psychose maniaco-dépressive. La forme la plus aigüe de bipolarité. "Elle touche 1 à 2% de la population", dit Christian Gay, psychiatre à la clinique de Garches (2). "Cela correspondait partiellement à ce que nous appelons aujourd’hui les troubles bipolaires de type I, les plus faciles à diagnostiquer, en raison du caractère aigu et souvent délirant des symptômes d'excitation facilement identifiables."
Depuis les années 1990, les troubles bipolaires sont cependant mieux connus. "On s’est rendu compte qu’ils étaient plus répandus qu’on ne le pensait. Mais ils n’étaient pas diagnostiqués, et souvent confondus avec des dépressions ou masqués par d'autres troubles associés telles l'alcoolo-dépendance, la toxicomanie ou des troubles graves de la personnalité".
On estime aujourd'hui que 6% de la population souffre de troubles bipolaires (toutes formes confondues, en intégrant aussi les formes atténuées telle la cyclothymie). Cette maladie encore assez méconnue constitue pourtant, selon l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé), la 6e cause de handicap dans le monde. "Sans compter le risque de suicide, évalué de 10 à 15%, et un taux élevé de mortalité", rappelle Christian Gay.
- Les différentes formes de bipolarité
Les bipolaires "type 2" sont moins reconnaissables. "Les phases d'excitation sont dites hypomaniaques car plus discrètes", explique Christian Gay. "Elles sont donc difficiles à repérer. Les personnes souffrant de ce trouble sont souvent d'ailleurs bien intégrées. Ce n'est que quand survient la dépression qu'elles sont traitées. "Ce qui pose un sérieux problème, car soigner un trouble bipolaire uniquement avec des antidépresseurs peut aggraver la maladie".
Les spécialistes ont ainsi détecté toute une catégorie de troubles, les type 3 : "Ce sont des formes révélées par les antidépresseurs, alors qu’elles auraient dû être traitées ou associées à des régulateurs d’humeurs."
Les types 4 correspondent aux troubles cyclothymiques.
Quant aux type 5, ils correspondent à un profil de patients hyperactifs. "Ils restent en permanence en phase d'excitation. Ce sont souvent des personnes avec d'importantes responsabilités dans leur travail, qui vivent à 100 à l'heure. Et sont donc rarement diagnostiqués comme tels... sauf lorsqu'ils tombent en dépression, ce qui peut leur arriver à tout moment."
- Comment soigne-t-on ces troubles ?
Avec tous les risques qui en découlent : désinsertion sociale, familiale et professionnelle, des cycles qui s'accélèrent et deviennent ingérables, un trouble qui devient chronique. Aujourd'hui, le traitement de la bipolarité ne repose cependant plus seulement sur les médicaments.
"Les thérapies comportementales peuvent se révéler très bénéfiques. On utilise aussi beaucoup désormais la psycho-éducation, une approche qui aide le patient et son entourage à déceler et juguler les crises." Les patients doivent aussi tout faire pour préserver un rythme de vie stable, routinier, dormir, éviter les situations de stress. "Si elle est prise en charge tôt et bien suivie, une personne atteinte de trouble bipolaire peut tout à fait avoir une vie normale".
- Quelles sont les causes de la maladie ?
"Un traumatisme dans l’enfance peut constituer une situation de vulnérabilité au même titre qu'un terrain prédisposé génétiquement", dit Christian Gay. "Souvent, un deuil, une situation de stress comme la préparation d'un examen ou un choc émotionnel jouent le rôle de détonateur."
(1) "L'Intranquille", de Gérard Garouste et Judith Perrignon (Editions de l'Iconoclaste, 2009).
(2) "Vivre avec un maniaco-dépressif", de Christian Gay (Hachette, 2008).
(3) "Un fou dans l'art, confessions d'un serial collectionneur", de Jean Albou (Editions la Martinière, 2010).
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