zaterdag 8 maart 2014

Je vis avec 439 euros/mois, dans la ville la plus pauvre de France : j'ai ravalé ma fierté

Selon un sondage TNS Sofres, 80% des maires constatent une aggravation de la pauvreté dans leurs communes. À Roubaix, ville la plus pauvre de France, Marlène Pruvot vit seulement grâce au RSA, soit 439,90 euros par mois. Un calvaire dont elle ne voit pas le bout.

L'association les Restos du cœur lors de l'ouverture à Lievin dans le Pas-de-Calais (BAZIZ CHIBANE/SIPA).

J’ai 55 ans et je ne survis que grâce au Revenu de solidarité active (RSA). Il y a deux ans je travaillais dans une usine de confiserie, mais j’ai dû arrêter car je souffre d’arthrose dégénérative. Plus jamais je ne pourrai travailler. Ma santé ne me le permet pas.

Depuis 25 ans, je vis à Roubaix et j’entends bien rester dans la plus pauvre ville de France. Une situation qui ne me surprend pas vu le nombre massif d’usines qui ont dû être fermées. Autour de moi, beaucoup de personnes vivent avec très peu d’argent.

Obtenir le statut d’handicapé est une priorité

À titre personnel, je pense que tout a commencé le jour où ma maladie s’est déclarée. J’ai cessé de travailler, puis j’ai enchaîné opération sur opération. Cinq au total en seulement deux ans.

Avec l’aide d’une assistante sociale, j’essaye de monter un dossier pour que l’État me permette d’obtenir le statut d’handicapé et que je puisse enfin dépendre d’une Maison départementale des personnes handicapées (MDPH). Compte tenu de ma situation, j'espère pouvoir percevoir l'allocation aux adultes handicapés (AAH). Pour le moment j'ai déposé quatre dossiers, ils ont tous été refusés.

Entre les médicaments non remboursés par la Sécurité sociale et les frais à avancer, il a fallu que ma famille me prête de temps en temps de l’argent. Mais mes enfants sont mariés et ne peuvent pas subvenir financièrement à mes besoins. Leur présence reste néanmoins mon petit remontant du quotidien. Sans eux, je ne sais pas ce que je deviendrais.

Je vis avec 439,90 euros par mois

Aujourd’hui, je reçois exactement 439,90 euros mensuels grâce au RSA et je peux vous assurer qu’avec une telle somme il ne me reste rien à la fin du mois.

Avec un loyer à 150 euros avec les APL (aides au logement), les factures de gaz et d’électricité, l’assurance maison, je n’ai plus que 40 euros pour subvenir à mes besoins alimentaires.

Pour tenter de joindre les deux bouts, je fais donc appel à des associations comme la Société Saint-Vincent de Paul ou les Restos du cœur qui me donnent chaque semaine des colis alimentaires. On y trouve des conserves, des légumes, des produits de première nécessité et de la viande. Et puis parfois, il y a des vêtements et de la vaisselle.

Utiliser l’eau de pluie et moins tirer la chasse

Quand vous vivez sous le seuil de pauvreté, c’est tout votre quotidien qui change. Aujourd’hui, je me déplace exclusivement en bus ou en taxi solidaire. Je veille systématiquement sur ma consommation d’eau et d’électricité au point de recueillir l’eau de pluie pour remplir ma machine à laver.

Certains soirs, je restreins même l’utilisation de ma télévision pour ne pas faire flamber la facture. Et puis quand mes petits-enfants viennent me rendre visite, je leur demande de faire comme moi et de ne pas tirer la chasse à chaque passage aux toilettes. Ça peut paraïtre anodin, mais tous ces petits gestes mis bout à bout représentent de vraies économies pour moi.

Je vis seule dans une maison sur deux étages. Il y a peu, un morceau du plafond s’est effondré et je n’ai pas les moyens de faire les réparations. L’évier est en ver-de-gris et menace de s’écrouler.

Cette situation ne peut plus durer. Je cherche un colocataire. Cela pourrait m’aider tant financièrement que moralement.

Tout loisir est dorénavant exclu de mon emploi du temps

Je me prive de nombreux petits plaisirs. Ainsi, je suis incapable de me souvenir de mon dernier restaurant ; je ne vais plus chez le coiffeur, préférant qu’une amie se charge de ça bénévolement ; et j’ai également arrêté d’aller à la piscine, alors que j’adorais ça.

Les jours se suivent et se ressemblent : médecin, kinésithérapeute et garde de mes petits-enfants. Tout loisir est dorénavant exclu de mon emploi du temps.

Quand on se retrouve dans ma situation, on ravale sa fierté. Car un jour ou l’autre, vous êtes obligé de vous tourner vers des associations caritatives. Elles sont toujours là pour vous écouter et pour vous tendre une main.

Je pense que si je tiens le coup, c’est surtout grâce mon caractère. Mais la santé ne suit pas et mon calvaire ne semble pas vouloir s’arrêter. Je continue de croire que ma situation changera, mais parfois j’ai tout simplement envie de jeter l’éponge.


Propos recueillis par Louise Auvitu

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