petite histoire que je me suis racontée cette nuit: Léopold a un problème

Léopold, le lion n'avait pas le moral.
Léopoldine était partie à la chasse comme d'habitude avec les petits, Pol, Paula et Pauline, entrainant avec elle sa soeur Géraldine et ses petits à elle, Ralf et Rolf.
Lui, Léopold, s'ennuyait mortellement. Il lui fallait à tout prix consulter quelqu'un. Mais qui?

Elie, le viel élephant était devenu sourd, alors lui crier son tourment serait bien imprudent, après tout, il était le roi, non?
Les félins à tâches ou à rayures, ocelot, jaguar, guépard, lynx étaient en réunion, seule Patricia, la panthère noire était disponible, mais c'était bien connu qu'elle ne savait pas tenir sa langue. Alors, réunion ou pas, il ne demandera jamais de l'aide à la famille, ils y verraient de la faiblesse et Régis, le tigre, par exemple aurait trop de plaisir à revendiquer la place de roi, il en portait déjà abusivement le prénom. alors, non.
Quant à Sidonie, la vipère, elle, avait de l'avis de tous mauvaise langue!
Odilon, le crocodile était mélancolique, - quelle idée aussi de l'avoir appelé Odilon?-: personne ne voulait de sa compagnie, car il versait des larmes constamment, heureux ou malheureux, si bien qu'on ne savait jamais à quoi s'attendre avec lui, alors tout le monde gardait ses distances, même Léopold.
Sa vue ne lui rendrait de toutes façons pas le moral.
Gilberte devrait tant se baisser pour éviter qu'il lui parle à voix trop haute que son arthrose de giraffe viellissante la ferait encore plus souffrir. L'hippopotame, Boris, à la peau dure était d'un tel calme que Léopold n'osait le déranger, de plus il avait son propre oiseau pour lui picorer les insectes sur le dos et ne comprendrait pas bien son humeur morose. Il était certes le roi, mais n'en était pas moins discret.

Son moral baissait de plus en plus: personne vraiment à qui s'ouvrir, beaucoup le craignaient et ceux qui ne le craignaient pas ouvertement étaient soit indifférents soit moqueurs, comme Cécilia, l'hyène qui lui riait constamment au nez, mais reculait de biais à son approche.

Mais qu'en était-il du serpent? On le savait manipulateur, ce "beau Serge", on avait entendu parler d' un énorme précédent chez un des ses aïeux,- les humains en savaient long à ce sujet-, mais peut-être pouvait-on essayer de lui donner une chance en se fiant à lui, une fois seulement?

Léopold se mit à la recherche de Serge, qui avait coutume de se faufiler un peu partout, aussi était-il souvent au courant des histoires des uns et des autres. De plus, celui-ci avait bien remarqué que Léopold était morose depuis pas mal de temps. Il savait, en outre, que les félins étaient en réunion, donc il n'avait rien à craindre d'eux. De Cécilia, peut-être? Il fallait tenter le coup, qui ne risque rien, n'a rien.

C'est ainsi que Serge sétait glissé vers le repaire de Léopold, sans trop se faire remarquer et s'apprêtait à lui donner le bonjour juste au moment où... ces-dames lionnesses revinrent de leur chasse, les petits bien repus, avaient du mal à s'élancer vers leurs père et oncle, les mères rapportant de gros morceaux pour leur roi.
Ssss.... chance manquée, susurrait le serpent dépité... Une autre fois!

Léopoldine, fière, mais épuisée, s'effondra non loin de Léopold, non sans le guetter du coin de l'oeil. Elle avait bien surpris ses airs et ses soupirs et aurait bien échangé sa place au soleil au lieu de courir à l'affût de proies qu'elle lui servait royalement au retour d'innombrables courses.
Soudain, elle se mit à lui raconter ses soucis, à elle, devant cette tâche parfois ingrate. Léopold n'y avait pas vraiment pensé, la force de cette habitude ancestrale et sa paresse aussi, entretenue d'année en année. Pourqoui, n'irait-il pas montrer à ses petits comment  lui, il chassait? De temps en temps, question de se dérouiller les pattes, hein? L'idée le tentait, car elle venait de lui et de lui seul, évidemment. Léopoldine l'encourageait...
Ce qui fut dit, fut fait.

On n'a jamais vraiment su si son moral était revenu, mais on a appris que Léopoldine était ravie de rester au foyer de temps à autre à bavarder avec ses consoeurs et ses filles, laissant la part du labeur au roi.